Le maestro de l’AS Douanes est la belle histoire de ce rassemblement, celle d’un joueur dont les blessures ont ruiné une carrière prometteuse, émotif mais qui n’a pas peur d’exprimer ses sentiments. Après les moments de galères, le voilà dans les eaux potables des Lions.
Richard Sagna, ce nom vous dit quelque chose ? Si oui, c’est parce que vous êtes un inconditionnel amateur du football sénégalais dans sa généralité. Ou c’est parce que vous avez suivi avec beaucoup d’intérêts, sur nos canaux, la publication de la liste de Pape Thiaw, jeudi dernier. Sinon, il vous aurait été très difficile de savoir de qui il s’agissait réellement : talent, finesse, énorme impact offensif, techniquement doué pour le high level mais déchu. Bref, un immense potentiel dont le parcours est finalement devenu peu banal et sinueux.
Ça, nous le savons. Ou disons qu’on connaît surtout la carrière au parfum d’inachevé de Richard Sagna, notamment à cause de ses histoires de blessures à répétition. Mais on connaît un peu moins toute sa trajectoire et l’impact de toutes ces blessures sur le plan psychologique. Ça tombe bien, le milieu offensif de l’AS Douanes s’est confié devant les caméras de la Fédération Sénégalaise de Football (FSF). Et la surprise sur la liste de Pape Thiaw ne veut surtout pas cacher ses sentiments. Quitte à avoir presque les larmes aux yeux.
« J’ai commencé ma pré-formation à Ziguinchor, dans l’école de foot ‘Ousmane Konté’, avant de l’achever au Dakar Sacré-Cœur. Le président du DSC Mathieu Chupin avait mis tout en œuvre pour que je sois à l’aise et que je réussisse. J’ai eu de grosses blessures qui m’ont éloigné des terrains. Malgré cela, Mathieu avait confiance en moi, il m’a aidé et soutenu. J’ai été opéré avec succès, j’ai recommencé à jouer. J’ai rejoint par la suite l’équipe nationale juniore, celle de feu Joseph Koto (pour préparer la CAN U20 2015). Mais on m’a diagnostiqué une pubalgie à un mois de la compétition, ce qui m’a de nouveau éloigné des terrains pendant plus de quatre mois. Je n’ai pas pu jouer à la CAN, alors que le Sénégal était pays organisateur. »
Sa carrière a pris du plomb sur l’aile, et presque lui aussi par la même occasion. Quand un joueur est considéré comme un grand espoir du football dès le plus jeune âge, qu’il voit en lui un bel avenir, et que finalement tout ses espoirs virent au cauchemar pour une raison ou une autre, le principal intéressé peut vite tomber dans une spirale infernale, perdu sans le ballon rond. Problèmes physiques, soucis mentaux, perte de confiance, d’estime de soi. C’est un peu ce qu’a pu vivre Richard Sagna qui a même failli appuyer définitivement sur le bouton stop.
« C’est à partir de là que ma carrière a réellement basculé et continue de décliner. J’étais complètement bouleversée. Mais entre-temps je suis allé au Casa Sports où j’ai repris goût pour le football. J’ai été par la suite transféré à l’AS Douanes et, là non plus, tout ne s’est pas déroulé comme prévu. J’ai eu des ligaments croisés au bout de ma deuxième saison. Je ne comprenais plus et je songeais réellement arrêter le football. La rééducation, les docteurs, c’était des moments de grande solitude. Puis un ami m’a appelé au téléphone pour me remettre les idées à l’endroit. Je ne voulais rien entendre et je pleurais. Puis j’ai repris les entraînements et je jouais avec les jeunes de mon quartier. J’ai eu des hauts et beaucoup de bas. J’ai été refusé par des clubs, mais j’ai persévéré et continuer à travailler. »
Après toutes ses désillusions, Sagna a fait le choix, il y a quelques mois, de revenir à l’AS Douanes, afin d’aider son club de cœur, relégué en Ligue 2 en 2023, de retrouver l’élite. Comme il l’indique, cela lui a permis de se retrouver, s’épanouir à nouveau, et dans le même temps d’être convoqué en Equipe Nationale. Une merveilleuse résurrection comme on les aime. Avec la manière dont sa carrière s’est déroulée, on peut dire que le maître à jouer des Gabelous possède une vraie légitimité. Il est la preuve vivante qu’il ne faut jamais abandonner. Car lui, à force de persévérer, a aujourd’hui retrouvé le droit chemin.
« Ma constance depuis l’année m’a permis d’être convoqué aujourd’hui en équipe nationale, un rêve que j’avais perdu. Aujourd’hui, par la force des choses, je côtoie les Sadio Mané, les Koulibaly, les Abdou Diallo et les Gana. Je partage les entraînements avec eux, je n’en reviens pas. Ils m’ont accueilli comme si j’avais toujours été un des leurs. C’est comme si j’étais chez moi dans mon quartier. Ils m’ont facilité l’intégration. A tout ceux qui disent que c’est impossible, je vous demande de croire en vous. Ayez la foi. Même si vous traversez des épreuves difficiles, croyez-en vous, mettez du sérieux dans ce que vous faites. Que personne ne vous détourne de vos rêves. Si moi, Richard Sagna, j’ai pu rejoindre l’équipe nationale alors tout le monde peut le faire. Peu importe vos rêves, peu importe, votre métier, n’abandonnez jamais. Foncez. Ma carrière est maintenant relancée. Pourquoi pas vous ? »
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